Nombreuses sont les
chansons qui appuient leur sujet sur le thème de l'amour ou des liaisons
amoureuses...
Les chansons d'amour
du répertoire traditionnel s'inscrivent souvent dans un décor pastoral ; on y
retrouve une symbolique particulière : la bergère courtisée, le rossignol conseiller d'amour ,
l'hirondelle messagère, le jardin d'amour... Le galant n'y a pas toujours le premier rôle et la
"courtisée" a sont mot à dire : amant éconduit, choix du meilleur
parti (thème récurant des "3 capitaines"...) ou remise en
cause des décisions parentales (thème de "la fille du geôlier"...)
Les histoires d'amour
sont aussi souvent présentées sous forme d'anecdotes et les propos tendres cèdent
alors le pas à des contes plus enjoués et même, parfois, à une certaine "grivoiserie" dissimulée dans les
termes employés (ambiguïté, double-sens possible de certains mots) ou dans
les situations.
Le thème de l'amour
est très souvent sous-jacent aux autres thèmes, en particulier à ceux des conscrits
ou des marins pour lesquels le départ signifiait l'abandon d'un être cher.
Mariage -
Maumariés - Infanticide
Nos chansons d'amour
font rarement référence au mariage et, symétriquement, les chansons évoquant
le mariage ne traite que peu d'amour : la chanson populaire y voit, au
contraire, la fin des plaisirs et de la vie insouciante de la jeunesse et le
début des tracas familiaux.
Les chansons de noce,
généralement solennelles, étaient destinées à accompagner les différentes
phases de la cérémonie du mariage : chant du prétendant invitant l'épousée
à se rendre au mariage, marche nuptiale accompagnant le cortège, chansons
présentant les compliments aux "novis" puis clôturant la noce...
Malgré une réelle gaieté, ces chansons restent empreintes d'une certaine
mélancolie.
Mais le mariage a ses
inconvénients que les chansons traditionnelles ne manquent pas de mettre en
avant en les développant de façon souvent satirique. De nombreuses chansons
décrivent ainsi les déboires résultant de mauvaises unions : ces "maumariés"
sont présentent en toutes les régions ; ce sont surtout les femmes qui
supportent les sévices d'un mauvais époux, mais l'homme, comme dans de
nombreuses chansons cajun, peut aussi être en situation de "mal
marié"...
Quelques chansons,
enfin, conte l'histoire d'enfants maltraités, voire d'infanticides ; ces
chansons, si elles restent en nombre limité, s'avèrent particulièrement
poignantes.
Travaux des champs
Labours, moissons,
vendanges... toutes les activités du monde rural trouvent leur place dans
le répertoire traditionnel.
Les chants de labour
sont un exemple d'une catégorie de ces chants destinés à stimuler
l'énergie des hommes et des animaux : les textes sont alors secondaires et se
limitent à de simples couplets répétés ou laissent la place à une
succession d'onomatopées rythmant le travail des terres.
Les chants de
vendanges peuvent aussi rentrer dans cette catégorie, ce sont alors des
chansons simples accompagnant les vendangeurs dans leur cueillette ; mais le
plus souvent, chantés au repas de fin de vendange, ils célèbrent le "jus
de la treille" et rejoignent les chansons à boire de tradition plus
urbaine.
Les activités plus contemplatives
des bergers ont amenés, au contraire, des chants empreints de douceur mettant
en avant la beauté de la nature.
Enfin, de nombreuses
chansons développant d'autres thèmes s'inscrivent dans un contexte rural qui transparaît
au fil de l'histoire tant par le milieu décrit que par les personnages
présentés ; ainsi nombreuses sont les chansons d'amour mettant en scène des
bergères (pastourelles) et ont trouve dans le répertoire des chants
contant les anecdotes survenues qui à un bouvier, qui à un meunier...
Fêtes et saisons
Les saisons, les rites
religieux, rythmaient la vie paysanne et l'on ne manquait pas de marquer les
temps forts de l'année par des fêtes, prétexte à des quêtes ou des bals
villageois. La musique prenait une place importante, les paroles s'adaptant aux
circonstances : gaies pour célébrer le retour du printemps et les fêtes païennes,
enjouée, voire "coquine", pour accompagner les quêtes, ou plus
solennelle pour fêter les événements religieux tels que les Paques et les
Noëls.
Les
chansons à boire, à manger, étaient souvent reprises en cœur lors des repas
de fête.
Les chansons de
quêtes se retrouvent en toutes régions. Au Premier de l'An, pour les
étrennes, à l'Épiphanie ainsi qu' à l'occasion de la Semaine Sainte,
jeunes gens, jeunes filles, enfants allaient de porte en porte solliciter des
dons ; des chants incitant les donateurs étaient alors entonnés par les
quêteurs, flattant les propriétaires et n'hésitant pas, si nécessaire, à
bousculer un peu les récalcitrants.
Le mois de Mai et la
Saint-Jean, étaient aussi l'occasion de quêtes, mais il s'agissait avant tout
de célébrer l'arrivée du printemps ; on dansait des rondes autour de l'arbre
de Mai ou du feu de la Saint-Jean, et surtout on chantait la beauté de la
nature, les mérites du printemps et, bien sûr, les plaisirs de l'amour...
Les Noëls, dont de
beaux exemples nous sont donnés par la tradition Bressane , sont des chants
dont les airs sont souvent empruntés à la pratique liturgique
mais la tradition populaire y a apporté sa marque : simplicité et naïveté prévalent.
Boire
et manger
Si
elles sont issues de la tradition des villes et villages où elles étaient
entonnées dans les tavernes, les chansons incitant à boire, et parfois
à manger, ont été reprises aussi par le monde rural à l'occasion des fêtes,
des noces.
Les
nombreux récits faisant l'éloge du bon vin, les portraits caricaturaux
de buveurs qui y "trouvent leur compte" en échappant à une
mégère acariâtre... sont autant de façons d'aborder ce thème. Ces
chansons à boire sont alors des historiettes alertes, ne manquant pas
d'humour, souvent reprises en cœur par les participants : les chansons à
répondre sont une forme privilégiée pour ce thème.
Certaines
chansons sont toutefois plus mélancoliques et s'attachent à dégager une
certaine philosophie (thème du "Sans-soucis").
On
retrouve des chansons à boire en toutes régions, les Québécois et les
Cajuns affectionnant particulièrement ce thème : on retrouve dans leur
répertoire de superbes chansons enjouées et non dénuées d'une certaine
finesse.
Métiers et
compagnons
Les métiers étaient
souvent honorés aux fêtes des saints-patrons des différentes corporations :
des chants, ventant les mérites des professions, étaient alors entonnés ;
savetiers, papetiers, bouchers... avaient ainsi leur hymne...
De même, les
compagnons (charpentiers, tailleurs de pierres...) avaient leurs chants de
ralliement : outre les mérites propres à leur métiers, ses chants évoquent
leur long périple ainsi que, parfois, l'impatience à retrouver leur belles...
De nombreuses chansons
de métiers comportent des refrains imitant, soit avec des onomatopées soit
avec des mots choisis, les bruits des outils au travail : on entend la navette
du tisserand rouler, la pierre du rémouleur siffler, la roue de la fileuse
ronfler, les engrenages du moulin cliqueter.
Enfin, des chansons
mettent en scène les artisans dans des histoires, souvent anecdotiques ou
satiriques, abordant les désagréments du métier (fréquent pour "Leroulier"),
les situations ambiguës (thème de "La petite lingère"), mais
aussi des bons moments passés (thème de "Mon père a fait bâtir
maison"). Le meunier occupe, dans ce genre, une place particulière :
sa réputation de galant parait établie et nombreuses sont les belles qui
tombent sous son charme ; de fait le thème du meunier relèvent souvent
plus de la chanson grivoise que des chants de métier...
Mendiants,
vagabonds
Choix de vie ou
fatalité, tous ne peuvent se prévaloir d'un métier ; les mendiants et
les vagabonds content parfois leur histoire : errance, difficultés
rencontrées, mais aussi, éloge de la liberté.
Plusieurs chansons du
répertoire traditionnel d'expression française touchent à ce thème ; nombre
d'entre-elles rejoignent le répertoire des chansons à boire : le thème du
"Sans-soucis" en est un bon exemple.
Ces chansons apportent
parfois des explications sur l'origine de ces situations difficiles en nous
renvoyant souvent à des amours déçus ; sauf en pays Cajun ("Travailler,
c'est trop dur"), la dureté du labeur est bien moins invoquée...
Conscrits
ou engagés
La conscription par
tirage au sort amenait de nombreux jeunes à quitter leur pays : ils étaient
alors partagés entre le plaisir de découvrir le monde et la mélancolie de
quitter les proches ; les chansons
nombreuses qui développent ce thème sont le reflet de cette ambiguïté.
Les chansons de marche
constituent une part de ce répertoire, mais, au delà des quelques chants
"officiels" ou historiques, le bon sens populaire des auteurs anonymes
nous a donné des textes qui caricaturent souvent la vie militaire.
Les anecdotes, parfois
tragiques, sont un prétexte pour critiquer les incohérences de la guerre et
justifier certaines insoumissions.
Mais ce sont quand
même les adieux du conscrit à sa mie qui constituent le thème le plus
fréquent ; le thème de la fille-soldat qui s'engage pour suivre son
amant, semble être une alternative utopique à ce déchirement, un rêve de
soldat... La plupart du temps, les amours sont définitivement remis en cause
par les longues mobilisations ("Sept ans, c'est bien longtemps").
Ce contexte nous
amène à trouver dans ce thème, de très belles histoires d'amour mettant en
exergue la fidélité jusque dans la mort : les différentes versions du "Pierre
de Grenoble" rentre dans cette catégorie.
Marins et bateaux
La situation des
marins s'apparente à celle des soldats et les chansons de marins évoquent
souvent les belles laissées au port ; ballades ou complaintes amoureuses sont
nombreuse dans le répertoire des marins.
La rude vie de marins
est aussi abordée, mais le goût de la découverte et des rêves
sous-tendus, le cadre parfois féerique des paysages marins, ne sont sûrement
pas étrangers à la dimension poétique des textes propre à ce genre
particulier.
Les bâtiments font
l'objet de descriptions non dénuées d'une certaine fierté, voire d'affection,
de la part des marins qui vivent à leur bord.
Les évènements
tragiques sont aussi décrits dans des chants à caractère historique, mais, au
contraire des chants de soldats souvent truculents, la sobriété est
généralement de mise : elle n'en sont que plus poignantes.
Enfin, on retrouve
dans ce type de répertoire des chants repris en cœur par les marins pour
hisser la voile, tendre les haubans.... Ces chants entonnés pour se donner du courage
et rythmer les activités du bord, rejoignent dans leur forme les autres chants
de travail.