Sous le nom de "folk",
la musique traditionnelle a connu, en France, des années de gloire entre
1970 et 1980.
Pendant ces années folk, une véritable
engouement pour cette musique s'est fait jour, touchant des jeunes et des moins
jeunes, amenant un véritable
renouveau
de la musique traditionnelle.
A cette époque, si les jeunes écoutaient bien sûr les
Beatles et les autres groupes" pop", leurs premiers pas à la guitare
se faisaient avec les accords des chansons d'Hugues Aufray ou de Graeme
Allwright qui puisaient, pour une part importante de leur répertoire, dans
la musique traditionnelle américaine :
ils connaissaient et appréciaient le "folk-song" américain et
étaient prêts à écouter la musique populaire d'expression française que
quelques passionnés étaient aller chercher auprès des anciens et les médias
à faire une place à ce "nouveau" genre, entre la "pop" et
la "variété" .
Déjà
à la fin des années soixante, les maisons des jeunes et de la culture accueillaient
les précurseurs, tel Serge Kerval qui publie son premier disque de
chansons traditionnelles d'expression française en 1965 (Chansons
des pays de France n°1 chez BAM).
Il publiera beaucoup d'autres disques exclusivement dédiés à cette
musique - outre la série "Chansons des pays de France"; les
volumes "Complaintes et balades de France" (volume 2 en 1993) et
des disques de récital - sans compter nombre de titres du répertoire
traditionnel dans son abondante discographie (voir
sa discographie sur le site pressibus.org)
Parallèlement
les médias commencent à diffuser du Folk-Song américain que les
traductions françaises de Graeme Allwright vulgarisent (voir
sa discographie sur son site officiel)
Au début des
années soixante-dix, le temps des collectages commence ;
il existe bien des recueils de musique traditionnelle française, établis
à la fin du XIXème siècle et notamment l'important travail de Joseph
Canteloube, mais les musiciens, issus pour une grande part de la
"génération 68", recherchent les traces encore vivantes de
cette musique : au delà des
musiques et des textes, ce qui les intéresse c'est l'ambiance qui naît
de la tradition orale et l'esprit festif qui entourait les veillées et
les bals.
Ils se
retrouvent dans des clubs, tels "Le Bourdon", " La Veille
Herbe" à Paris et "La Chanterelle" à Lyon, où la musique
est partagée dans cet esprit.
En Août 1970
a lieu le premier festival de "folk-song" à Lambesc, l'occasion
de publier le disque "C'est la fête à Lambesc" ;
d'autres festivals suivront : à Vesdun en 1971 puis à Pons en 1973. Les
musiciens qui s'y retrouvent sont issus des clubs français mais sont
aussi présents des musiciens et groupes étrangers ainsi que des
musiciens et chanteurs traditionnels rencontrés lors des collectages tels
Louise Reichert et André Vermerie, chanteuse et musicien du
Rouergue.
En 1972,
les musiciens du Bourdon publient le
disque "Musique populaire d'expression française" ;
participent à ce disque, John Wright, Catherine Perrier, Phil
Fromont, Christian Gour'Han, Youra, Hal et Dany
ainsi que Jean-Loup Baly, Jean-François Dutertre et Yvon
Guilcher, le trio qui constituera plus tard le groupe Mélusine.
En 1973,
Yvon Guilcher et Jean-François Dutertre s'associeront à Naik
Raviart et Mône Dufour pour publier "La Préhistoire du
Folk" ; le disque est édité chez Pathé, mais la plupart des
disques de folk sont alors publiés chez "Le Chant du Monde" ou
chez de petits éditeurs tels "Expression spontanée". Parmis
ceux-ci, nombreux sont les disques de collectage en France mais
aussi en Pays Cajun
Les autres
éditeurs commenceront à s'intéresser à la musique folk à partir de
1974 : la production, plus axée sur les prestations de la mouvance folk
issue des clubs, se fait plus nombreuse. Les groupes se font et se dont
pour renaître sous une autre forme au gré des concerts et festivals.
Si les médias
commencent à diffuser leur musique, ces musiciens préfèrent
fréquenter les nombreux bals folks organisés dans tout le pays.
De 1974 à
1979, c'est la grande période folk en France : les clubs, toujours
très actifs, sont des lieux de rencontre privilégiés où l'on partage
les découvertes faites sur le terrain.
Des disques de
collectages sont publiés : "Chant du monde" édite une
"Anthologie de la musique traditionnelle française" en 6
volumes dont le premier est réalisé en 1975 par l'association "Le
Bourdon" ; les suivants sont consacrés à différentes régions de
France.
Les musiciens
font aussi oeuvre de pédagogie : dans une série "Spécial
Instrumental" éditée par "Chant du monde", ils
présentent les instruments et leurs différentes facettes.
Des
groupes se forment dont certains sont pérennes tels le groupe "Mélusine",
issu du club du Bourdon qui publiera 7 disques de 1975 à 1981 (puis 2
entre 85 et 90) et "la
Bamboche", issue du club de la Chanterelle, qui
publiera 6 disques de 1974 à 1980 ;parmi les plus productifs, il
convient de citer aussi "Malicorne" (8 disques entre 74
et 81) et "Pelinpinpin Folc" (5 disques entre 75 et 87).
Ces musiciens ne
se limitent pas au répertoire d'une région ; au contraire, ils se
complaisent à toucher à l'ensemble du répertoire francophone. Musiciens
"de leur temps", leurs textes sont généralement en français
et les dialectes régionaux des chansons originelles ne se retrouvent que
dans les disques de collectages et ceux à caractère plus "régionaliste".
Au début des années quatre-vingt,
le mouvement perd de sa vigueur en France ; les production purement
traditionnelles sont moins nombreuses et une part des musiciens, pour
"faire vivre" leur musique y introduisent une certaine
modernité : les arrangements sont retravaillés, des instruments
électriques sont introduits... D'autres, restés fidèles à
l'esprit fondateur se réinvestissent dans un travail plus théorique d'ethnomusicologie
fondé sur leur important travail de collectage (Yvon Guilcher...) ou
s'oriente vers le conte (Jean-Loup
Baly...)
Chez nos cousins
francophones d'Amérique, le mouvement demeure avec, en particulier
au Québec, le groupe "La
Bottine Souriante" qui commence à publier en 1978 et publie
encore aujourd'hui.
Aujourd'hui,
La musique traditionnelle d'expression française n'a plus de place dans
les médias. Elle vit cependant encore grâce aux groupes régionaux et à
quelques passionnés qui organisent sur le terrain des bals folks et des
stages de danse où l'on retrouve parfois les musiciens des années 70.
Je vous invite
à parcourir le net avec un bon moteur de recherche : je suis sûr que
vous trouverez encore la trace vivante de cette musique...